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retrait d'agrément d'ambulance et conditions référé suspension

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    remy PHILIPPOT
  • il y a 5 jours
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Le juge des référés du TA Lyon retient le doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée sur la disproportion de la sanction


Ainsi, "Eu égard à la nature des faits retenus à l'encontre de la société Avicenne ambulances, et non contestés, suite au contrôle effectué sur un de ses véhicules le 10 octobre 2024, et alors que la société, créée en 2007, n'avait jusque-là jamais fait l'objet de sanctions, le moyen tiré de ce que la sanction prononcée est disproportionnée est de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de cette décision".



Tribunal administratif de Lyon, 22 mai 2025, 2505102



Vu la procédure suivante

 : Par une requête enregistrée le 24 avril 2025, la société Avicenne ambulances, représentée par Me Albisson, demande au juge des référés : 1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de l'arrêté du 18 mars 2025 par lequel la directrice de l'agence régionale de santé Auvergne-Rhône-Alpes a prononcé, pour une durée de deux mois à compter du 27 mai 2025, le retrait temporaire de son agrément pour effectuer des transports sanitaires terrestres ; 2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la condition d'urgence est remplie ; la décision entrainera des conséquences humaines désastreuses, puisqu'elle ne pourra pas, durant deux mois, prendre en charge ses patients habituels avec lesquels elle est liée depuis de nombreuses années et qui doivent être régulièrement transportés ; elle ne pourra établir aucune facture au titre de ses transports de patients pendant cette période, ce qui représente une perte estimée à environ 110 000 euros, alors que ses charges pour deux mois ont été estimées à 104 822 euros ; elle ne pourra plus verser de salaires à ses sept salariés, ni payer le loyer des locaux qu'elle occupe à Vénissieux, ni honorer ses obligations en matière de cotisations sociales et fiscales ; - sont propres à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée, les moyens suivants : il y a lieu de douter de la réalité et de la régularité de l'avis du sous-comité des transports sanitaires (SCOTS) du Rhône du 12 décembre 2024, visé dans l'arrêté en litige, mais dont elle ne dispose pas et dont il n'est d'ailleurs pas démontré qu'il aurait été rendu au vu du rapport du médecin désigné par l'agence régionale de santé ; la sanction prononcée est disproportionnée au regard des manquements avérés, des circonstances de leur commission et du comportement général de leur auteur ; elle n'a fait l'objet d'aucune sanction de la part de l'agence régionale de santé depuis sa création en 2007 ; elle a fait l'objet d'un traitement inégalitaire par rapport à d'autres sociétés ambulancières. Par un mémoire en défense enregistré le 16 mai 2025, l'agence régionale de santé Auvergne-Rhône-Alpes, représentée par Me Francia, conclut au rejet de la requête, et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la société requérante au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la condition d'urgence n'est pas démontrée ; les documents produits sont insuffisamment probants, et ne sont accompagnés d'aucun justificatif permettant de vérifier la véracité des données avancées ; il n'est pas établi que la perte du chiffre d'affaires ferait peser un risque réel sur la santé financière de la structure et lui imposerait des licenciements économiques ou la cessation de son activité ; - aucun moyen n'est propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision en litige. Vu les autres pièces du dossier et la requête enregistrée sous le n° 2505101 par laquelle la société Avicenne ambulances demande l'annulation de la décision en litige.

Vu :

- le code de la santé publique ; - le code de justice administrative. Vu la décision par laquelle la présidente du tribunal a désigné M. Besse, président, pour statuer sur les demandes de référé. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Au cours de l'audience publique tenue en présence de Mme Lecas, greffière d'audience, M. Besse a lu son rapport et entendu les observations de : - Me Albisson, représentant la société Avicenne ambulances, qui a repris ses conclusions et moyens ; - M. A, représentant la société Avicenne ambulances ; - Me Venceslau, représentant l'agence régionale de santé, qui a persisté dans ses conclusions et moyens. A l'issue de l'audience, la clôture d'instruction a été reportée au mardi 20 mai 2025 à midi pour pouvoir permettre à la société Avicenne ambulances de produire des pièces plus précises de la part de son expert-comptable, pour l'agence régionale de santé Auvergne-Rhône-Alpes de produire l'avis émis par le SCOTS du Rhône. L'agence régionale de santé a produit une pièce enregistrée le 19 mai 2025. La société Avicenne ambulances a produit des pièces enregistrées le 20 mai 2025. En application de l'article R. 552-8 du code de justice administrative, la clôture d'instruction a été reportée une seconde fois le 21 mai 2025 à 17 heures.

Considérant ce qui suit

 : 1. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. ".

2. La société Avicenne ambulances demande au juge des référés de suspendre l'exécution de l'arrêté du 18 mars 2025 par lequel la directrice de l'agence régionale de santé Auvergne-Rhône-Alpes a prononcé le retrait temporaire de son agrément, pour une durée de deux mois à compter du 27 mai 2025.

3. D'une part, l'urgence justifie que soit prononcée la suspension d'un acte administratif lorsque l'exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre. Il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte litigieux sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue. L'urgence doit être appréciée objectivement et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce.

4. Pour justifier que la décision en litige porte une atteinte grave et immédiate à sa situation, la société Avicenne ambulances fait valoir que la mesure en litige la privera d'un chiffre d'affaires pouvant être estimé à environ 110 000 euros sur la période, selon les estimations qui peuvent être faites à partie de son activité sur la période correspondante lors des années passées, et elle soutient qu'en raison de cette perte d'activité, elle ne sera pas en mesure de couvrir ses charges, et notamment le paiement des rémunérations de ses sept salariés, de sorte qu'elle serait certainement contrainte de les licencier ou même de cesser son activité. Il résulte des comptes de résultat produits par la requérante et du tableau certifié par son expert-comptable que la société, sur cette période de deux mois, doit faire face à des charges évaluées à plus de 100 000 euros, notamment la location de ses locaux et charges locatives à hauteur d'environ 10 000 euros, le remboursement des crédits baux des véhicules, pour un montant d'environ 7 600 euros, le paiement des assurances à concurrence de 4 058 euros, tandis que la rémunération des salariés sur cette période devait représenter un montant supérieur à 46 000 euros. Par ailleurs, il résulte de l'instruction que la situation de la société reste fragile puisque, si elle a pu réaliser en 2024 un bénéfice de 13 731,72 euros, ce n'est que du fait que son gérant a renoncé à sa rémunération pendant environ un tiers de l'année. Dans ces conditions, et alors en outre que la société Avicenne ambulances fait valoir que la décision pourrait rompre ses liens avec une partie des patients qu'elle véhicule, la requérante démontre suffisamment que la mesure en litige, qui entraine sa cessation d'activité pendant une période de deux mois, est de nature à porter une atteinte suffisamment grave et immédiate à sa situation, pour que la situation d'urgence, au sens des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, soit regardée comme remplie.

5. D'autre part, eu égard à la nature des faits retenus à l'encontre de la société Avicenne ambulances, et non contestés, suite au contrôle effectué sur un de ses véhicules le 10 octobre 2024, et alors que la société, créée en 2007, n'avait jusque-là jamais fait l'objet de sanctions, le moyen tiré de ce que la sanction prononcée est disproportionnée est de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de cette décision.

6. Les deux conditions posées par l'article L. 521-1 du code de justice administrative étant remplies, il y a lieu de suspendre l'exécution de l'arrêté du 18 mars 2025 en litige.

7. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la société Avicenne ambulances tendant à la mise à la charge de l'agence régionale de santé d'une somme au titre des frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés. Par ailleurs, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions que présente sur leur fondement l'agence régionale de santé Auvergne-Rhône-Alpes, partie perdante.

ORDONNE :

Article 1er : L'exécution de l'arrêté du 18 mars 2025 par lequel la directrice de l'agence régionale de santé Auvergne-Rhône-Alpes a prononcé, pour une durée de deux mois à compter du 27 mai 2025, le retrait temporaire de l'agrément de la société Avicenne ambulances est suspendue jusqu'à ce qu'il soit statué au fond sur sa légalité. Article 2 : Les conclusions présentées par les deux parties au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à la société Avicenne ambulances et à l'agence régionale de santé Auvergne-Rhône-Alpes. Fait à Lyon, le 22 mai 2025. Le juge des référés, T. Besse La greffière, S. Lecas La République mande et ordonne à la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision

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