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Autorisation d'acquisition et de détention d'armes et contrôle du juge

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    remy PHILIPPOT
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Tribunal administratif de Nantes, 5ème Chambre, 7 mai 2025, 21072962107296


Vu la procédure suivante

 : Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés respectivement le 1er juillet 2021 et le 15 novembre 2024, M. C B, représenté par Me Fabrice Delavoye, demande au tribunal, dans le dernier état de ses écritures : 1°) d'annuler la décision du 26 mars 2021 par laquelle le préfet de la Vendée a rejeté sa demande d'autorisation d'acquisition et de détention de quatre armes de catégorie B, a ordonné le dessaisissement de ses trois armes de catégorie C, ainsi que la décision du 29 mars 2021 portant inscription au fichier national des interdits d'acquisition et de détention d'armes (FINIADA) ; 2°) d'enjoindre au préfet de la Vendée, à titre principal, d'ordonner la levée de son inscription au fichier national des interdits d'acquisition et de détention d'armes (FINIADA), dès la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa demande d'autorisation d'acquisition et de détention d'armes et de munitions de catégorie B, dès la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la décision attaquée est insuffisamment motivée ; - elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, notamment en ce que le préfet de la Vendée s'est fondé sur des faits qui n'ont donné lieu à aucune condamnation, et qui sont anciens et isolés, insusceptibles de justifier une interdiction au sens de l'article R. 312-21 du code de la sécurité intérieure ; - elle est entachée d'une erreur d'appréciation, les faits sur lesquels le préfet de la Vendée s'est fondé étant insusceptibles de justifier le dessaisissement de ses armes de catégorie C. Par un mémoire en défense enregistré le 17 février 2022, le préfet de la Vendée conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que l'ensemble des moyens de la requête ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 5 novembre 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 20 novembre 2024. Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, par un courrier du 17 février 2025, que le jugement était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité du moyen de légalité externe soulevé postérieurement à l'expiration du délai de recours contentieux (Conseil d'Etat, 20 février 1953, Intercopie). Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la sécurité intérieure ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique du 26 février 2025 qui s'est tenue à 10 heures : - le rapport de Mme A, - et les conclusions de M. Guilloteau, rapporteur public.

Considérant ce qui suit

 : 1. M. C B a sollicité le 6 octobre 2020, auprès des services du préfet de la Vendée, une autorisation d'acquisition et de détention de quatre armes de catégorie B. Par une décision du 26 mars 2021, le préfet de la Vendée a rejeté sa demande, et a ordonné le dessaisissement de ses trois armes de catégorie C, et, par une décision du 29 mars 2021, a informé M. B de son inscription au fichier national des interdits d'acquisition et de détention d'armes (FINIADA). Par la présente requête, M. B demande l'annulation de ces deux décisions.

2. Aux termes de l'article L. 312-3-1 du code de la sécurité intérieure " L'autorité administrative peut interdire l'acquisition et la détention des armes, munitions et de leurs éléments des catégories A, B et C aux personnes dont le comportement laisse craindre une utilisation dangereuse pour elles-mêmes ou pour autrui ". Aux termes de l'article L. 312-4 du même code : " L'acquisition et la détention des armes, éléments d'armes et de munitions de catégorie B sont soumises à autorisation dans des conditions définies par un décret en Conseil d'Etat. () ". L'article R. 312-21 du même code prévoit que : " En application des articles L. 312-2 et L. 312-4, les conditions dans lesquelles peuvent être autorisées l'acquisition et la détention des matériels de guerre, armes, munitions et de leurs éléments des catégories A et B sont définies, par catégorie de personnes intéressées, au paragraphe 6 de la présente sous-section. / L'autorisation n'est pas accordée lorsque le demandeur : / () 3° A un comportement incompatible avec la détention de ces matériels de guerre, armes, munitions et leurs éléments, révélé par l'enquête diligentée par le préfet. () ". Aux termes de l'article L. 312-11 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " Sans préjudice des dispositions de la sous-section 1, le représentant de l'Etat dans le département peut, pour des raisons d'ordre public ou de sécurité des personnes, ordonner à tout détenteur d'une arme, de munitions et de leurs éléments de toute catégorie de s'en dessaisir. / Le dessaisissement consiste soit à vendre l'arme les munitions et leurs éléments à une personne titulaire de l'autorisation, mentionnée à l'article L. 2332-1 du code de la défense, ou à un tiers remplissant les conditions légales d'acquisition et de détention, soit à la remettre à l'Etat. Un décret en Conseil d'Etat détermine les modalités du dessaisissement. / Sauf urgence, la procédure est contradictoire. Le représentant de l'Etat dans le département fixe le délai au terme duquel le détenteur doit s'être dessaisi de son arme, de ses munitions et de leurs éléments ". Aux termes de l'article R. 312-67 de ce même code : " Le préfet ordonne la remise ou le dessaisissement de l'arme ou de ses éléments dans les conditions prévues aux articles L. 312-7 ou L 312-11 lorsque : / () 3° Il résulte de l'enquête diligentée par le préfet que le comportement du demandeur ou du déclarant est incompatible avec la détention d'une arme ; cette enquête peut donner lieu à la consultation des traitements automatisés de données personnelles mentionnés à l'article 26 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 () ".

3 Pour rejeter la demande d'autorisation sollicitée par M. B et lui ordonner de se dessaisir de ses armes en sa possession, le préfet de la Vendée s'est notamment fondé sur l'enquête diligentée par les services de la gendarmerie nationale, en vertu des dispositions précitées, qui conclut à un avis défavorable quant à l'acquisition d'une arme de catégorie B, M. B ayant fait l'objet d'une procédure pour des faits de violence et de dégradation du bien d'autrui qui se seraient déroulés le 22 juillet 2016 aux Sables d'Olonne.

4. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du procès-verbal établi le 25 janvier 2022 par les services de la gendarmerie nationale de Fontenay-le-Comte, que, le 22 juillet 2016, M. B a eu une altercation avec deux personnes alors qu'il circulait en moto avec son frère dans une rue en sens interdit aux Sables d'Olonne. Il ressort par ailleurs de ce procès-verbal, qu'au cours de cette altercation pour laquelle M. B a été entendu par les services de gendarmerie, des coups auraient été échangés, M. B aurait jeté un téléphone à terre et aurait sorti un couteau. Pour autant, si M. B ne conteste pas avoir été l'auteur de la dégradation du téléphone, qu'il a reconnu avoir jeté à terre alors que son propriétaire voulait prendre une photographie de la plaque d'immatriculation de sa moto, il conteste être l'auteur des faits de violence pour lesquels les témoignages relevés par les services de la gendarmerie n'étaient pas concordants et n'ont pas permis de déterminer l'auteur de l'infraction concernant les faits de violence. Par suite, le préfet de la Vendée, qui ne produit aucun autre élément permettant de caractériser l'incompatibilité du comportement de M. B avec la détention d'armes de catégorie B en vue de la pratique du tir sportif au regard du 3° de l'article R. 312-21 du code de la sécurité intérieure, a commis une erreur manifeste d'appréciation en rejetant la demande d'acquisition de quatre armes de catégorie B. Dans ces conditions, en se fondant sur les mêmes faits pour considérer que le comportement de M. B présentait un danger nécessitant d'ordonner le dessaisissement de ses trois armes de catégorie C, le préfet de la Vendée a fait une inexacte application de l'article L. 312-7 du code de la sécurité intérieure.

5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. B est fondé à demander l'annulation de la décision du préfet de la Vendée par laquelle cette autorité a rejeté sa demande d'autorisation de détentions d'armes et de munitions de catégorie B et a prononcé le dessaisissement de ses armes de catégorie C, ainsi que, par voie de conséquence, la décision d'inscription de M. B au Fichier national des interdits d'acquisition et de détention d'armes (FINIADA). Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. L'exécution du présent jugement implique que la demande d'autorisation d'acquisition et de détention de quatre armes de catégorie B de M. B soit réexaminée et qu'il soit radié du fichier FINIADA. Il y a lieu, par suite, d'enjoindre au préfet de la Vendée de réexaminer sa demande et de faire procéder à cette radiation dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement. Il n'y a pas lieu en revanche d'assortir cette injonction de l'astreinte demandée. Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. B et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Les décisions du 26 et du 29 mars 2021 du préfet de la Vendée sont annulées.


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