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Un permis de construire ne vaut permis de régularisation que si cette régularisation est explicitement sollicitée !





Par une décision du 17 juin 2024, le Conseil d'État réaffirme qu’un permis de construire modificatif peut régulariser le permis initial si et seulement s'il ressort clairement des pièces du dossier et des échanges avec le service instructeur que cette régularisation est sollicitée.



La régularisation d’un vice entachant le permis de construire initial ne peut pas se déduire du simple dépôt d’un permis de construire modificatif et ceci, même si le vice entachant le permis de construire initial ne résulte que d’une absence de délégation de signature ! 



Il convient d’être particulièrement vigilant sur la rédaction des pièces composant la demande de permis de construire destinée à régulariser une irrégularité. 


Rémy PHILIPPOT, du Cabinet ECHO AVOCAT accompagne les professionnels et particuliers dans la défense des permis de construire ainsi que dans les contentieux de refus/retrait des autorisations de construire.

Tel: 07.62.57.17.75



Conseil d'État, 4ème - 1ère chambres réunies, 17/06/2024, 471711, Inédit au recueil Lebon

Conseil d'État - 4ème - 1ère chambres réunies

  • N° 471711

  • ECLI:FR:CECHR:2024:471711.20240617

  • Inédit au recueil Lebon

Lecture du lundi 17 juin 2024

Rapporteur

M. Edouard Solier

Rapporteur public

M. Jean-François de Montgolfier

Avocat(s)

SCP FOUSSARD, FROGER ; SCP BUK LAMENT - ROBILLOT ; SCP L. POULET-ODENT ; SARL CABINET BRIARD

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu les procédures suivantes :



La société Rondis d'une part et la société Sugah-Socapi d'autre part ont demandé à la cour administrative d'appel de Nancy d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 6 décembre 2019 par lequel le maire de Belfort a délivré à la société immobilière européenne des Mousquetaires un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale en vue de la création d'un supermarché d'une surface de vente de 2 450 m² exploité sous l'enseigne " Intermarché Super ", ainsi que d'un point permanent de retrait par la clientèle d'achats au détail commandés par voie télématique. Par un arrêt nos 20NC00260, 20NC00326 du 29 décembre 2022, la cour administrative d'appel a rejeté leur requête.



1° Sous le numéro 471711, par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire, et deux nouveaux mémoires, enregistrés les 27 février, 25 mai, et les 8 et 27 novembre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Rondis demande au Conseil d'Etat :



1°) d'annuler cet arrêt ;



2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;



3°) de mettre solidairement à la charge de la commune de Belfort et de la société Rondis, la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.




2° Sous le numéro 471749, par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 28 février, 30 mai et 14 novembre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Sugah-Socapi demande au Conseil d'Etat :



1°) d'annuler cet arrêt ;



2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;



3°) de mettre à la charge de l'Etat, de la commune de Belfort et de la société immobilière européenne des Mousquetaires chacun la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.




....................................................................................




Vu les autres pièces des dossiers ;



Vu :


- le code de commerce ;


- le code de l'urbanisme ;


- le code de justice administrative.




Après avoir entendu en séance publique :



- le rapport de M. Edouard Solier, maître des requêtes,



- les conclusions de M. Jean-François de Montgolfier, rapporteur public ;



La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP L. Poulet, Odent, avocat de la société Rondis, à la SARL cabinet Briard, avocat de la commune de Berfort, à la SCP Foussard, Froger, avocat de la société immobilière européenne des Mousquetaires, et à la SCP Buk Lament - Robillot, avocat de la société Sugah-Socapi ;



Vu la note en délibéré, enregistrée le 31 mai 2024, présentée par la commune de Belfort sous les n° 471711 et 471749 ;






Considérant ce qui suit :



1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société immobilière européenne des Mousquetaires a sollicité la délivrance d'un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale en vue de la création d'un supermarché d'une surface de vente de 2 450 m² exploité sous l'enseigne " Intermarché Super ", ainsi que d'un point permanent de retrait par la clientèle d'achats au détail commandés par voie télématique sur le territoire de la commune de Belfort. Le 9 juillet 2019, la commission départementale d'aménagement commercial de Belfort a émis un avis favorable au projet. Saisie de plusieurs recours contre cet avis, notamment par les sociétés Rondis et Sugah-Socapi, la Commission nationale d'aménagement commercial a également émis un avis favorable au projet le 7 novembre 2019. Par un arrêté du 6 décembre 2019, le maire de Belfort a délivré à la société immobilière européenne des Mousquetaires le permis de construire sollicité, puis, par un nouvel arrêté du 15 décembre 2020, un permis de construire modificatif. La société Rondis et la société Sugah-Socapi se pourvoient chacune en cassation contre l'arrêt du 29 décembre 2022 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté leur requête tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 décembre 2019. Ces pourvois présentant à juger les mêmes questions, il y a lieu de les joindre pour y statuer par une seule décision.



2. Lorsqu'une autorisation d'urbanisme est entachée d'incompétence, qu'elle a été délivrée en méconnaissance des dispositions législatives ou réglementaires relatives à l'utilisation du sol ou sans que soient respectées des formes ou formalités préalables à la délivrance de l'autorisation, l'illégalité qui en résulte peut être régularisée par la délivrance d'une autorisation modificative dès lors que celle-ci est compétemment accordée pour le projet en cause, qu'elle assure le respect des règles de fond applicables à ce projet, répond aux exigences de forme ou a été précédée de l'exécution régulière de la ou des formalités qui avaient été omises. Elle peut, de même, être régularisée par une autorisation modificative si la règle relative à l'utilisation du sol qui était méconnue par l'autorisation initiale a été entretemps modifiée ou si cette règle ne peut plus être regardée comme méconnue par l'effet d'un changement dans les circonstances de fait de l'espèce. Il en va de même dans le cas où le bénéficiaire de l'autorisation initiale notifie en temps utile au juge une décision individuelle de l'autorité administrative compétente valant mesure de régularisation à la suite d'un jugement décidant, en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, de surseoir à statuer sur une demande tendant à l'annulation de l'autorisation initiale. Dès lors que cette nouvelle autorisation assure la régularisation de l'autorisation initiale, les conclusions tendant à l'annulation de l'autorisation initialement délivrée doivent être rejetées.



3. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que la cour administrative d'appel de Nancy a jugé que le permis de construire modificatif délivré le 15 décembre 2020 à la société pétitionnaire, dès lors qu'il l'avait été compétemment, avait eu pour effet de régulariser le vice tenant à l'incompétence du signataire de l'arrêté du 6 décembre 2019, alors même que ce permis de construire modificatif n'avait pas été délivré dans le but de régulariser la compétence de son signataire et qu'il n'avait eu pour objet et pour effet que de modifier une partie du permis de construire. En déduisant ainsi de la seule circonstance que le permis de construire modificatif avait été délivré par l'autorité compétente qu'il pouvait être regardé comme ayant régularisé le vice d'incompétence dont était entaché le permis initial, alors qu'il lui appartenait de rechercher s'il résultait des pièces du dossier, tels que la chronologie dans laquelle s'inscrivait la demande de permis modificatif ou les échanges intervenus avec la commune à l'occasion de son instruction, que ledit permis modificatif avait eu en l'espèce cet objet de régularisation, la cour administrative d'appel de Nancy a entaché son arrêt d'erreur de droit.



4. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de leurs pourvois respectifs, la société Rondis et la société Sugah-Socapi sont fondées à demander l'annulation de l'arrêt qu'elles attaquent.



5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Belfort et de la société immobilière européenne des Mousquetaires chacune la somme de 1 500 euros à verser à la société Rondis et de mettre à la charge de l'Etat, de la commune de Belfort et de la société immobilière européenne des Mousquetaires chacun la somme de 1 000 euros à verser à la société Sugah-Socapi au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la société Rondis et de la société Sugah-Socapi qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes.









D E C I D E :


--------------


Article 1er : L'arrêt du 29 décembre 2022 de la cour administrative d'appel de Nancy est annulé.


Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Nancy.


Article 3 : La commune de Belfort et la société immobilière européenne des Mousquetaires verseront chacune une somme de 1 500 euros à la société Rondis, et l'Etat, la commune de Belfort et la société immobilière européenne des Mousquetaires, verseront chacun une somme de 1 000 euros à la société Sugah-Socapi au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


Article 4 : Les conclusions de la commune de Belfort et de la société immobilière européenne des Mousquetaires présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.


Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société Rondis, à la société Sugah-Socapi, à la société immobilière européenne des Mousquetaires, à la commune de Belfort, et à la Commission nationale d'aménagement commercial.


Copie en sera adressée au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.


Délibéré à l'issue de la séance du 27 mai 2024 où siégeaient : M. Rémy Schwartz, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Maud Vialettes, Mme Gaëlle Dumortier, présidentes de chambre ; M. Jean-Luc Nevache, M. Alban de Nervaux, M. Jean-Dominique Langlais, conseillers d'Etat ; Madame Catherine Brouard-Gallet, conseillère d'Etat en service extraordinaire ; Mme Julia Beurton, maîtresse des requêtes et M. Edouard Solier, maître des requêtes-rapporteur.





Rendu le 17 juin 2024.



Le président :


Signé : M. Rémy Schwartz


Le rapporteur :


Signé : M. Edouard Solier


Le secrétaire :


Signé : M. Christophe Bouba

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