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Contributions OFII et contrôle des documents d'identité frauduleux

  • Photo du rédacteur: remy PHILIPPOT
    remy PHILIPPOT
  • 29 mai
  • 12 min de lecture


Le Tribunal Administratif retient que:


"Toutefois, il résulte de l'instruction, et notamment de l'attestation de la chargée de recrutement œuvrant pour le compte de la société Optimum 50 Temporis, que celle-ci a personnellement reçu M. A le 3 décembre 2021, en vue de son inscription à l'agence, et qu'elle a sollicité la présentation de l'original de sa carte d'identité. Dans ces conditions, la société requérante démontre qu'elle a exigé la présentation de l'original de la carte d'identité de M. A. En outre, la société requérante fait valoir que le document présenté offrait toutes les apparences de l'authenticité et qu'il lui était impossible de vérifier le type d'encre utilisé ou encore le QR code présent au verso du titre.

 Dès lors, dans les circonstances particulières de l'espèce tenant notamment au fait que la société n'est pas identifiée comme un opérateur ayant déjà commis ce type de manquement ou pour avoir recruté des salariés dépourvus de titre les autorisant à travailler, elle est fondée à faire valoir qu'elle s'est acquittée des vérifications qui lui incombent et qu'elle n'était pas en mesure de savoir que ce document revêtait un caractère frauduleux ou procédait d'une usurpation d'identité et qu'ainsi, elle ne pouvait être sanctionnée sur le fondement des dispositions citées au point 3".



Tribunal administratif de Caen, 2ème Chambre, 26 mars 2025, 2300470


Texte intégral


Vu les procédures suivantes : I. Sous le n° 2300470, par une requête et un mémoire, enregistrés le 23 février 2023 et le 24 juillet 2023, la société Optimum 50 Temporis, représentée par la SELARL Baugas-Craye, demande au tribunal : 1°) d'annuler la décision du 5 octobre 2022 par laquelle le directeur de l'office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a mis à sa charge le versement d'une somme de 7 460 euros au titre de la contribution spéciale, ainsi qu'une somme de 2 553 euros au titre de la contribution forfaitaire, ensemble la décision de rejet de son recours gracieux ; 2°) à titre subsidiaire, de réduire à de plus justes proportions le montant de la contribution spéciale et de faire application du taux minoré dans les conditions prévues par les dispositions de l'article R. 8253-2 du code du travail ; 3°) de mettre à la charge de l'Office français de l'immigration et de l'intégration la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1a> du codede de justice administrative. La société Optimum 50 Temporis soutient que : - la décision du 5 octobre 2022 est entachée d'une incompétence ; - les décisions attaquées sont entachées d'une insuffisance de motivation ; - la décision de rejet du recours gracieux est entachée d'illégalité, faute de transmission préalable du procès-verbal constatant l'infraction ; - l'infraction n'est pas constituée, dès lors qu'elle n'était pas en mesure de déceler le caractère contrefait de la pièce d'identité qui lui a été présentée ; - il y a lieu de réduire le montant de la somme due dès lors que les conditions prévues au III. de l'article R. 8253-2 du code du travail sont remplies ; - la contribution forfaitaire méconnait le principe, notamment garanti par l'article 4 du septième protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, selon lequel nul ne peut être poursuivi ou puni pénalement deux fois en raison des mêmes faits. Par un mémoire en défense, enregistré le 9 juin 2023, l'Office français de l'immigration et de l'intégration conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés. II. Sous le n° 2301988, par une requête et un mémoire, enregistrés le 24 juillet 2023 et le 6 mars 2025, la société Optimum 50 Temporis, représentée par la SELARL Baugas-Craye, demande au tribunal : 1°) d'annuler le titre de perception émis le 21 octobre 2022 par lequel le ministre de l'intérieur l'a rendue redevable de la contribution spéciale pour un montant de 7 460 euros ; 2°) de la décharger du montant de cette somme ou, à défaut, d'en réduire le montant et de faire application du taux minoré dans les conditions prévues par les dispositions de l'article R. 8253-2 du code du travail ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1a> du codede de justice administrative. La société Optimum 50 Temporis soutient que : - le titre de perception est entaché d'incompétence ; - le titre de perception n'est pas signé ; - la décision du 5 octobre 2022 mettant à sa charge la contribution spéciale est entachée d'une incompétence ; - les décisions du 5 octobre 2022 mettant à sa charge la contribution spéciale et le rejet du recours gracieux exercé contre cette décision sont entachées d'une insuffisance de motivation ; - la décision de rejet du recours gracieux est entachée d'illégalité, faute de transmission préalable du procès-verbal constatant l'infraction ; - l'infraction n'est pas constituée, dès lors qu'elle n'était pas en mesure de déceler le caractère contrefait de la pièce d'identité qui lui a été présentée ; - il y a lieu de réduire le montant de la somme due dès lors que les conditions prévues au III. de l'article R. 8253-2 du code du travail sont remplies ; - la contribution forfaitaire méconnait le principe, notamment garanti par l'article 4 du septième protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, selon lequel nul ne peut être poursuivi ou puni pénalement deux fois en raison des mêmes faits. Par un mémoire, enregistré le 27 février 2025, l'Office français de l'immigration et de l'intégration conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés. La requête a été communiquée au ministre de l'intérieur, qui n'a pas produit de mémoire. III. Sous le n°2301990, par une requête et un mémoire, enregistrés le 24 juillet 2023 et le 6 mars 2025, la société Optimum 50 Temporis, représentée par la SELARL Baugas-Craye, demande au tribunal : 1°) d'annuler le titre de perception émis le 21 octobre 2022 par lequel le ministre de l'intérieur l'a rendue redevable de la contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement de l'étranger dans son pays d'origine pour un montant de 2 553 euros ; 2°) de la décharger du montant de la sanction ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1a> du codede de justice administrative. La société Optimum 50 Temporis soutient que : - le titre de perception est entaché d'incompétence ; - le titre de perception n'est pas signé ; - la décision du 5 octobre 2022 est entachée d'incompétence ; - les décisions du 5 octobre 2022 et de rejet du recours gracieux exercé contre cette décision sont entachées d'une insuffisance de motivation ; - la décision de rejet du recours gracieux est entachée d'illégalité, faute de transmission préalable du procès-verbal constatant l'infraction ; - l'infraction n'est pas constituée, dès lors qu'elle n'était pas en mesure de déceler le caractère contrefait de la pièce d'identité qui lui a été présentée ; - il y a lieu de réduire le montant de la somme due dès lors que les conditions prévues au III. de l'article R. 8253-2 du code du travail sont remplies ; - la contribution forfaitaire méconnait le principe, notamment garanti par l'article 4 du septième protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, selon lequel nul ne peut être poursuivi ou puni pénalement deux fois en raison des mêmes faits. Par un mémoire, enregistré le 27 février 2025, l'Office français de l'immigration et de l'intégration conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés. La requête a été communiquée au ministre de l'intérieur, qui n'a pas produit de mémoire. Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code du travail ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Absolon, première conseillère, - les conclusions de M. Blondel, rapporteur public, - et les observations de la SELARL Baugas-Craye, avocate de la société Optimum 50 Temporis.

Considérant ce qui suit

 : 1. A la suite de la réception du procès-verbal d'infraction dressé par les services de police dans le cadre de l'interpellation de M. A, ressortissant ivoirien, interpellé pour faux et usage de faux alors qu'il s'est présenté à l'accueil de la société Naval Group, le 13 décembre 2021, pour une mission de cariste, l'Office français de l'immigration et de l'intégration a, par décision du 5 octobre 2022, mis à la charge de la société Optimum 50 Temporis, agence d'intérim, la contribution spéciale prévue par l'article L. 8253-1 du code du travail, d'un montant de 7 460 euros, et la contribution forfaitaire prévue à l'article L. 822-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, d'un montant de 2 553 euros. Le 27 octobre 2022, la société a exercé un recours gracieux contre cette décision, lequel a fait l'objet d'une décision implicite de rejet. Par la présente requête, la société Optimum 50 Temporis demande l'annulation de la décision du 5 octobre 2022, de celle de rejet de son recours gracieux et de celle des titres émis pour le recouvrement des contributions. Sur la jonction des requêtes :

2. Les requêtes enregistrées sous les n° 2300470, 2301988 et 2301990 présentent à juger des questions connexes et ont fait l'objet d'une instruction commune. Par suite, il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par un même jugement. Sur les conclusions aux fins d'annulation et de décharge :

3. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 8251-1a> du code du travailil : " Nul ne peut, directement ou indirectement, embaucher, conserver à son service ou employer pour quelque durée que ce soit un étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France. () ". Aux termes de l'article L. 8253-1 du même code, dans sa rédaction en vigueur à la date des décisions attaquées : " Sans préjudice des poursuites judiciaires pouvant être intentées à son encontre, l'employeur qui a employé un travailleur étranger en méconnaissance des dispositions du premier alinéa de l'article L. 8251-1 acquitte, pour chaque travailleur étranger non autorisé à travailler, une contribution spéciale. Le montant de cette contribution spéciale est déterminé dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. Il est, au plus, égal à 5 000 fois le taux horaire du minimum garanti prévu à l'article L. 3231-12. Ce montant peut être minoré en cas de non-cumul d'infractions ou en cas de paiement spontané par l'employeur des salaires et indemnités dus au salarié étranger non autorisé à travailler mentionné à l'article R. 8252-6. Il est alors, au plus, égal à 2000 fois ce même taux. Il peut être majoré en cas de réitération et est alors, au plus, égal à 15 000 fois ce même taux. / L'Office français de l'immigration et de l'intégration est chargé de constater et fixer le montant de cette contribution pour le compte de l'Etat () ". Aux termes de l'article L. 8271-17 du même code : " Outre les agents de contrôle de l'inspection du travail mentionnés à l'article L. 8112-1, les agents et officiers de police judiciaire, les agents de la direction générale des douanes et les agents du Conseil national des activités privées de sécurité commissionnés par son directeur et assermentés sont compétents pour rechercher et constater, au moyen de procès-verbaux transmis directement au procureur de la République, les infractions aux dispositions de l'article L. 8251-1 relatif à l'emploi d'un étranger non autorisé à travailler et de l'article L. 8251-2 interdisant le recours aux services d'un employeur d'un étranger non autorisé à travailler. () ". Aux termes de l'article R. 8253-3 du même code, dans sa rédaction en vigueur à la date des décisions attaquées : " Au vu des procès-verbaux qui lui sont transmis en application de l'article L. 8271-17, le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration indique à l'employeur, par lettre recommandée avec avis de réception ou par tout autre moyen permettant de faire la preuve de sa date de réception par le destinataire, que les dispositions de l'article L. 8253-1 sont susceptibles de lui être appliquées et qu'il peut présenter ses observations dans un délai de quinze jours ". Enfin, l'article R. 8253-4 de ce code dispose : " A l'expiration du délai fixé, le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration décide, au vu des observations éventuelles de l'employeur, de l'application de la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1, la liquide et émet le titre de perception correspondant. "

4. Il appartient au juge administratif, saisi d'un recours contre une décision mettant à la charge d'un employeur la contribution spéciale et la contribution forfaitaire et la contribution forfaitaire prévues par les dispositions précitées, pour avoir méconnu les dispositions de l'article L. 8251-1a> du code du travailil, de vérifier la matérialité des faits reprochés à l'employeur et leur qualification juridique au regard de ces dispositions. Il lui appartient, également, de décider, après avoir exercé son plein contrôle sur les faits invoqués et la qualification retenue par l'administration, soit de maintenir la sanction prononcée, soit d'en diminuer le montant jusqu'au minimum prévu par les dispositions applicables au litige, soit d'en décharger l'employeur. Ces contributions ont pour objet de sanctionner les faits d'emploi d'un travailleur étranger séjournant irrégulièrement en France, ou démuni d'un titre l'autorisant à exercer une activité salariée, sans qu'un élément intentionnel soit nécessaire à la caractérisation du manquement. Néanmoins, un employeur ne saurait être sanctionné sur le fondement de ces dispositions lorsque, tout à la fois, il s'est acquitté des vérifications qui lui incombent, relatives à l'existence du titre autorisant l'étranger à exercer une activité salariée en France, en vertu de l'article L. 5221-8 du code du travail, et n'était pas en mesure de savoir que les documents qui lui étaient présentés revêtaient un caractère frauduleux ou procédaient d'une usurpation d'identité. En outre, lorsqu'un salarié s'est prévalu lors de son embauche de la nationalité française ou de sa qualité de ressortissant d'un État pour lequel une autorisation de travail n'est pas exigée, l'employeur ne peut être sanctionné s'il s'est assuré que ce salarié disposait d'un document d'identité de nature à en justifier et s'il n'était pas en mesure de savoir que ce document revêtait un caractère frauduleux ou procédait d'une usurpation d'identité.

5. Il résulte de l'instruction que M. A, ressortissant ivoirien, s'est présenté le 13 décembre 2021 à l'accueil de la société Naval Group pour exercer une mission de cariste, en présentant au service du contrôle des accès une fausse carte d'identité française. Il résulte du procès-verbal d'infraction établi le 15 décembre 2021, dans le cadre de l'enquête préliminaire conduite par la brigade mobile de recherche de Cherbourg, que l'intéressé a indiqué, au cours de son audition, avoir présenté à la société Optimum 50 Temporis, en vue de son embauche, une photocopie d'une fausse carte d'identité française. Toutefois, il résulte de l'instruction, et notamment de l'attestation de la chargée de recrutement œuvrant pour le compte de la société Optimum 50 Temporis, que celle-ci a personnellement reçu M. A le 3 décembre 2021, en vue de son inscription à l'agence, et qu'elle a sollicité la présentation de l'original de sa carte d'identité. Dans ces conditions, la société requérante démontre qu'elle a exigé la présentation de l'original de la carte d'identité de M. A. En outre, la société requérante fait valoir que le document présenté offrait toutes les apparences de l'authenticité et qu'il lui était impossible de vérifier le type d'encre utilisé ou encore le QR code présent au verso du titre.

Dès lors, dans les circonstances particulières de l'espèce tenant notamment au fait que la société n'est pas identifiée comme un opérateur ayant déjà commis ce type de manquement ou pour avoir recruté des salariés dépourvus de titre les autorisant à travailler, elle est fondée à faire valoir qu'elle s'est acquittée des vérifications qui lui incombent et qu'elle n'était pas en mesure de savoir que ce document revêtait un caractère frauduleux ou procédait d'une usurpation d'identité et qu'ainsi, elle ne pouvait être sanctionnée sur le fondement des dispositions citées au point 3.

6. Il résulte de ce tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens invoqués de la requête, que la société requérante est fondée à demander l'annulation des décisions attaquées et la décharge des sommes mises à sa charge par les titres de perception en litige. Sur les frais d'instance : 7. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la société Optimum 50 Temporis tendant à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1a> du codede de justice administrative.

Article 1er : La décision du 5 octobre 2022 par laquelle le directeur de l'office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a mis à la charge de la société Optimum 50 Temporis le versement d'une somme de 7 460 euros au titre de la contribution spéciale, ainsi qu'une somme de 2 553 euros au titre de la contribution forfaitaire et la décision de rejet du recours gracieux exercé contre cette décision sont annulées. Article 2 : Les titres de perception du 21 octobre 2022 sont annulés. Article 3 : La société Optimum 50 Temporis est déchargée des sommes mises à sa charge par les décisions annulées. Article 4 : Le surplus des conclusions des requêtes est rejeté. Article 5 : Le présent jugement sera notifié à la société Optimum 50 Temporis, à l'Office français de l'immigration et de l'intégration et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée, pour information, au directeur départemental des finances publiques de l'Essonne. Délibéré après l'audience du 11 mars 2025 à laquelle siégeaient : - M. Marchand, président, - Mme Absolon, première conseillère, - M. Pringault, conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 mars 2025. La rapporteure, Signé C. ABSOLON Le président, Signé A. MARCHAND La greffière, Signé A. D'OLIF La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, Le greffier en chef, D. Dubost Nos 2300470, 2301988 et 2301990

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